Il ne sait pas où il va, mais il va. C'est essentiel, c'est l'essentiel.
Second pas. Pas vraiment mieux, ni réellement pire. C'est l'enchaînement. La suite logique. C'est un ensemble, séparé en étapes. Mais qui reste un ensemble. Ce deuxième pas, seul, aurait été insignifiant, n'aurait eu aucun sens, n'aurait paru en rien spectaculaire. Mais additionné au premier, il prend toute sa valeur. Sur l'échelle de l'existence, c'est infime, microscopique. Sur l'échelle de l'existence d'un enfant de quelques jours, mois, années, c'est énorme.
Troisième pas. Parce que les pieds se détachent automatiquement du sol, à présent. Parce qu'il n'y a jamais deux sans trois. Parce que ce réflexe en devient enivrant, qu'on est entraîné, qu'on ne suit plus le rythme, le rythme invisible et muet. Parce qu'on a envie d'accélérer alors on accélère, les blanches deviennent noires, les noires croches et les croches double-croches. Chaque temps est doublé, la course est folle. On tangue. On tombe. On sait. Mais on est en vie. Et trois pas plus près de demain qu'aujourd'hui.
Un pas. Deux. Trois. Quand je me retournerai, tu ne seras plus là. Promets-moi rapidement et pars, et laisse-moi partir. On y croit comme on peut mais on sait qu'on a tort. On peut s'éloigner autant qu'on veut d'une personne, on peut rajouter des centaines, miliers, millions de kilomètres et les creuser, on peut tenter le tout pour le tout, et s'en aller, on peut... Mais on ne distancera jamais les sentiments. Ils restent là où ils sont, possesseurs de la même puissance. Ils suivent la trajectoire de l'autre, le suivent au doigt, à l'oeil et au battement de coeur. Ils ne s'arrêtent pas, n'abandonnent jamais, ne déploient jamais le drapeau blanc, n'acceptent pas la défaite, traquent la défaillance pour résonner un peu plus fort. L'absence, le manque, la distance, l'incertitude, le doute, la trahison sont autant de raisons d'aimer plus fort pour justement combler l'absence, réduire le manque, accepter la distance, diminuer l'incertitude, dominer le doute et adoucir la trahison.
Quand je me retournerai, tu seras encore là. Plus fier et fort que jamais, endossant ton sourire de toujours. Les yeux rivés sur moi pour me faire croire qu'il reste quelque chose.
Quelque chose. Un espoir ruisselant de sueur pour s'être battu si bien et être sorti de tout ça peut-être pas indemne, mais survivant. Quelque chose. Une étincelle suffisante pour foutre le feu à nos coeurs.
Quelque chose. Une chance, une nouvelle chance, une dernière chance, enchaînée à toutes ces autres qui n'ont servi à rien sinon nous enfoncer. Tu seras là, c'est une certitude que chacun connaît. Tu m'attendras au même endroit, serein et calme, sûr de ton coup, prêt à recommencer la partie de ce jeu qui te plaît tellement.
Pix : Boubekeur.
mots-c0eur, Posté le jeudi 28 février 2008 11:38
Tres belle photographie.